Les frustrations, difficultés et rêves des schizophrènes
La schizophrénie est une maladie dont le spectre est assez étendu. Tous les commentaires de cet article ne s’appliquent pas à tous les schizophrènes, étant donné qu’il est difficile de généraliser.
Les principales frustrations et difficultés viennent des symptômes négatifs de la schizophrénie (retrait social, apathie, …). Elles sont malheureusement amplifiées par la prise de neuroleptiques à plus ou moins forte dose. Le rêve de tout schizophrène serait de pouvoir se passer de ces médicaments, mais l’expérience prouve que le rapport risque de rechute/stabilisation encourage à poursuivre le traitement.
À noter que les neuroleptiques agissent uniquement sur les symptômes, sans pouvoir aider dans la direction d’un rétablissement.
Le manque d’émotions
Les commentateurs sportifs adorent ce mot : l’émotion. C’est par exemple l’extase dans un stade de foot lorsque l’équipe qu’on soutient marque un but. C’est l’incertitude de l’issue d’un match de tennis.
Les neuroleptiques privent les schizophrènes de cette sensation.
La prise de poids
Certains neuroleptiques font prendre beaucoup de poids comme le Zyprexa, parfois jusqu’à 30 kilos. C’est beaucoup. Ça influe non seulement sur la motricité, mais également sur l’image que les autres auront d’un schizophrène, l’obésité étant associée au laisser-aller.
Les effets secondaires des neuroleptiques
Mis à part la prise de poids, certains neuroleptiques constipent, d’autres perturbent l’équilibre hormonal, d’autres la sexualité.
Les psychiatres administrent souvent des médicaments complémentaires. Exemple contre la dyskinésie, ce qui entraîne entre d’autres effets secondaires (bouche sèche, etc…) ou des anti-dépresseurs.
La perturbation du sommeil
Certains neuroleptiques sont sédatifs, d’autres provoquent des insomnies. La première catégorie plonge dans un léger coma artificiel. La seconde est assez énervante. Les psychiatres essaient parfois de la contrebalancer par la prise d’un médicament supplémentaire.
Le manque de vie sociale
Pour la plupart des schizophrènes, le manque de vie sociale est tellement évident qu’il n’est même plus perçu comme tel. Les contacts sont parfois réduits à deux ou trois personnes. La vie consiste à attendre que le temps passe en ralentissant sa propre activité pour rendre ce processus plus supportable.
Les possibilités d’étendre la vie sociale sont douchées par le manque d’exercice à ce niveau-là. Ce manque d’habileté sociale fait qu’on n’essaie même plus de s’intégrer à un groupe.
Les hôpitaux psychiatriques ou organisations locales (GEM) proposent des ateliers pour rencontrer d’autres personnes. Passer du temps avec d’autres malades psy, parfois atteints plus profondément, n’est pas du tout structurant, sauf peut-être lorsqu’on découvre la schizophrénie.
La méfiance
La schizophrénie se manifeste en très grande majorité par des craintes paranoïaques. Ces pensées s’auto-renforcent mutuellement en construisant une collusion du monde extérieur contre soi. Cette méfiance commence déjà dans des actes simples au quotidien, en étant perturbé par des petites choses, interprétées plus ou moins inconsciemment comme des menaces.
Le budget réduit
La plupart des schizophrènes vivent de l’AAH, l’allocation adulte handicapé, à hauteur de 1’000 euros par mois. La principale frustration n’est pas forcément de boucler la fin du mois avec ce budget, mais de voir dans les médias l’écart énorme avec les ultra-riches.
Ceci d’autant plus qu’un schizophrène n’ayant jamais travaillé ou ayant perdu le contact avec le monde du travail a du mal à s’imaginer les talents nécessaires à l’exercice d’un travail exigeant.
Dans certains cas, une curatelle est appliquée. Le budget se limite à de l’argent de poche.
Le renoncement à certains loisirs
La mémoire est souvent affectée. Lire un livre ou regarder un film en entier peut être difficile, voire impossible pour certains schizophrènes. Même lire des instructions de quelques lignes peut être décourageant.
Les voix et autres manifestations
70% des schizophrènes entendent des voix. C’est un phénomène assez agaçant. L’impression de ne jamais pouvoir être tranquille. L’augmentation de la dose des neuroleptiques est souvent sans effet sur ces voix ou convictions de persécution par des esprits, voisins ou autres.
Passons maintenant aux rêves des schizophrènes.
L’envie de se passer de médicaments
C’est d’autant plus tentant que les neuroleptiques donnent l’impression d’être guéri de la schizophrénie. Une rechute n’arrivera pas forcément immédiatement après l’arrêt. Ça peut durer des semaines, voire des années.
L’industrie pharmaceutique ne donne pas l’impression de travailler en priorité sur de nouvelles molécules. Les risques de nouveaux médicaments sont difficiles à estimer, malgré des études et essais à grande échelle.
L’envie de ne plus se réveiller
C’est malheureusement, formulé sous une forme édulcorée, le rêve de beaucoup de schizophrènes, épuisés par leur condition. Le suicide reste perçu comme un acte violent. Pourtant, le passage à l’acte est statistiquement beaucoup plus élevé que dans la moyenne de la population.
En conclusion, les frustrations sont multiples, parfois omniprésentes dans la vie de certains schizophrènes et les rêves sont très lointains.
One Comment
Air
Bonjour la Roue,
C’ est véritablement assez large comme article et je pense que l’ article réussi à englober pas mal de problèmatiques de la personne en situation de handicap schizophrénique, dans un court laps de mots.
Les émotions souvent en tout cas, dans le bouddhisme ne sont pas recherchées, sur la durée de la méditation, au contraire, mais pourtant bien nécessaires un minimum pour une vie sociale. Les neuroleptiques ainsi que la maladie je crois détruit tout ce bon ordre d’ émotion. Les neuroleptiques sédatifs ou autres agissent alors pour les premiers comme des anéantisseurs de ces dernières désordonnées et trop envahissantes pour la psyché d’ une personne qui voit alors ses émotions l’ envahir au point d’ atteindre l’ angoisse ou l’ anxiété, qui est aussi invalidante.
Merci pour cet article !